La « guerre » commerciale livrée à l’Egypte est la deuxième du genre après celle contre la Turquie. Le ministre de l’Industrie peut-t-il renégocier les accords de libre-échange avec les Etats-Unis ou l’UE, avec lesquels le déficit commercial est beaucoup plus important?
Lors de son passage, mercredi 23 juin 2021, devant la Commission des secteurs productifs de la Chambre des représentants, le ministre de l’industrie, Moulay Hafid Elalamy, a déclaré non sans fierté être «personnellement » derrière cette «guerre» livrée aux autorités égyptiennes. «Ce sera la guerre!», a-t-il lancé en faisant référence aux accords de libre-échange conclus avec l’Égypte, qui font perdre au Maroc quelque 6 milliards de dirhams chaque année, selon ses dires.
Il venait juste de terminer une réunion avec son homologue égyptienne en l’informant être «personnellement» derrière ces blocages, qui «ne feront que s’intensifier», si les autorités égyptiennes ne coopèrent pas.
En effet, selon le ministre, «les produits marocains attendent parfois trois mois pour être acceptés par les services de douanes en Égypte, alors qu’eux (les services égyptiens) exigent que leur cargaison soit acceptée en 24h». Cette «guerre» est la deuxième du genre après celle contre la Turquie dont l’accord consacrant l’avenant de l’accord de libre-échange a été signé récemment. Tout cela est bien. Mieux, le super-ministre a affirmé que le Royaume «reverra tous les accords de libre-échange» qui ne sont pas équitables.
Grandes puissances
Mais parviendra-t-il à renégocier avec les Etats-Unis ou l’Union européenne, avec lesquels le déficit commercial est beaucoup plus important? Le Maroc a signé 4 principaux accords de libre-échange: avec l’Union européenne (entré en vigueur en 2000), les Etats-Unis et la Turquie (2006), puis avec les pays de l’accord d’Agadir en 2007 (Tunisie, Egypte, Jordanie). A la suite de la signature de ces ALE, les importations ont progressé beaucoup plus vite que les exportations.
Le déficit commercial du Maroc se creuse avec tous les partenaires et une bonne partie des achats porte sur des produits finis de consommation, dont une partie peut tout à fait être fabriquée localement. Les effets néfastes des accords de libre-échange signés: pertes d’emplois, fragilisation de certaines filières comme le textile, l’agroalimentaire, la sidérurgie…
L’accord de libre-échange entre les États- Unis et le Maroc a été signé le 15 juin 2004 et est entré en vigueur le 1er janvier 2006. Depuis cette date, le commerce bilatéral entre les États-Unis et le Maroc a augmenté pour atteindre 3,3 milliards de dollars en 2020, contre 925 millions de dollars en 2005. Les exportations américaines vers le Maroc en 2020 ont totalisé 2,3 milliards de dollars et les exportations marocaines vers les États- Unis ont totalisé 1,04 milliard de dollars.
L’accord de libre-échange Maroc-UE bénéficie à l’Union européenne encore plus qu’au Maroc. La balance du commerce agricole le prouve. Les importations dans le cadre de l’accord avec l’Union européenne constituent 72,4% de la totalité des importations. Elles ont atteint 109,8 MMDH en 2019.
Comment en est-on arrivé là? Et peut-on renégocier les accords avec les grandes puissances comme les Etats-Unis ou l’UE? Et ce n’est pas à deux mois des élections que cette question ou même la renégociation des accords avec l’Egypte ou la Turquie doivent être médiatisés. Car cette réalité dure depuis des années.
Source : Maroc Hebdo