La production d’agrumes s’inscrit cette année en hausse de 15% par rapport à l’année précédente. Les profils de calibrage sont moyens à faibles, les prix à la baisse. Concernant l’export, une forte hausse des frais de transport est observée.
La campagne agrumicole 2021-22 se poursuit non sans difficultés. Derrière les chiffres, il y a l’inquiétude et la bataille quotidienne menée par les producteurs. Cinq familles de problèmes sont citées par nos interlocuteurs au sein de la profession.
– La persistance de la sécheresse « nous inquiète et inquiète tous les bassins agrumicoles », explique l’un de nos interlocuteurs. Il cite le Souss, Marrakech, Nador et Berkane.
– La logistique est un problème quotidien. Non seulement les coûts logistiques ont augmenté, mais la disponibilité des moyens de transport est devenue aléatoire.
– Le contrat-programme n’est pas signé.
– L’orange suscite des inquiétudes. L’Égypte a, depuis de nombreuses années, pris la place du Maroc sur les marchés de l’Europe occidentale en matière d’oranges, grâce entre autres à des prix défiant toute concurrence, notamment après les fortes dépréciations de la monnaie égyptienne. Or, si le Maroc pouvait exporter des oranges, les stations de conditionnement travailleraient davantage et le marché intérieur deviendrait plus rémunérateur.
– Le marché intérieur ne laisse pas de marges aux producteurs. Par exemple, les petits fruits sont cédés sortie station, entre 0,30 DH et 0,50 DH le kilo. Et sont vendus, au stade détail, au minimum dix fois plus cher. Cet étrange phénomène touche particulièrement les circuits de commercialisation des agrumes et décourage les producteurs.
Production
La production se caractérise cette année par un profil de calibrage moyen à faible, compte tenu des conditions climatiques qui ont prévalu lors de la formation des récoltes (manque de pluies et rationnement de l’irrigation à partir des barrages).
D’ailleurs, le phénomène du petit calibre est manifeste sur le marché local à des prix assez bas par rapport à ceux habituellement constatés ces dernières années.
Selon une source autorisée de Maroc-Citrus, les achats sur pied ont fortement reculé cette année. À titre d’exemple, la variété Nadorcott, qui se négociait en 2020-2021 à 4 DH/kg, a été bradée à moins de 3 DH/kg.
Or, cette variété, particulièrement prisée aussi bien par les marchés extérieurs que par le débouché local, ne porte que sur une production d’environ 250.000 tonnes. Ceci, bien que ce volume s’annonce en forte augmentation, en raison de l’entrée en pleine production des nouvelles plantations.
La même tendance à la baisse des prix a également, selon les mêmes sources, affecté la clémentine et la navel. Ceci, dans le contexte d’une production en hausse soutenue avec l’entrée en production des nouvelles plantations.
Pour l’actuelle saison, la production d’agrumes s’inscrit en haussede 15% par rapport à la campagne précédente, qui avait enregistré un volume global de 2,2 millions de tonnes.
Exportations : perturbations logistiques
En ce qui concerne les exportations, les prévisions établies par Maroc-Citrus tablaient sur un volume en hausse de 10% par rapport aux réalisations de la campagne précédente (environ 670.000 tonnes). Des prévisions revues à la baisse, du fait des perturbations du transport maritime et de l’éventualité de ne pas desservir les marchés de l’Amérique du Nord et ceux des pays du Golfe.
Selon les calculs de l’interprofession, le surplus des coûts varie entre 1,20 DH et 1,50 DH/kg d’après les destinations et le mode de transport. « C’est quasiment l’équivalent de la moyenne de recette du producteur sur les trois dernières années », constatent de nombreux producteurs d’agrumes.
Trois mois après son démarrage, la campagne d’exportation d’agrumes affiche jusqu’à présent, selon des sources professionnelles, une trajectoire normale. Du moins en ce qui concerne le volume des sorties.
Au total, près de 348.000 tonnes ont été expédiées au 11 janvier 2022, soit plus que la moitié des quantités prévues à l’export par l’interprofession agrumicole (670.000 tonnes).
Par variétés, les sorties portent essentiellement sur les petits fruits, dont 252.750 tonnes de clémentine, 27.650 de Nadorcott, 37.500 de la variété Nour.
Concernant les oranges précoces, un volume de 20.000 tonnes a été exporté à la même date, dont 15.000 tonnes de navel, 3.400 de Salustiana et 650 tonnes de sanguines.
Ces sorties sont-elles en phase avec le rythme normal des années précédentes ? À se référer aux chiffres communiqués par l’interprofession Maroc-Citrus, la répartition des exportations par marché fait ressortir une tendance quasiment similaire à celle constatée ces dernières années. Ce qui tranche quelque peu avec les craintes formulées par l’interprofession quant aux retombées négatives des coûts logistiques et du transport maritime sur l’accès des marchés lointains.
Sur les 348.000 tonnes expédiées jusqu’à janvier, l’Union européenne a absorbées 70.400, alors que la Russie s’est adjugée plus du double, soit 145.250 tonnes. Et c’est au niveau de ce marché que des problèmes d’écoulement et des prix ont été les plus aigus.
Les États-Unis, le Canada et les pays du Golfe ont été également desservis. Pas moins de 43.450 tonnes ont été écoulées sur le marché canadien. Il est suivi par le marché américain (35.630 tonnes), alors que près de 5.000 tonnes ont été destinées aux pays du Golfe. Le reste, soit environ un millier de tonnes, est réparti sur les divers marchés. Ceci, sans oublier le marché africain dont l’export non formalisé se développe de plus en plus. Pour cette première partie de la campagne d’exportation, il aura absorbé près de 20.000 tonnes, selon l’organisme en charge de coordination des exportations relayé par Maroc-Citrus.
Une situation suspendue aux conditions climatiques et aux comportements des marchés
Au total, Maroc-Citrus prévoit l’export de 650.000 tonnes, soit 520.000 tonnes de petits fruits et 130.000 tonnes d’oranges.
Bien évidemment, la situation pourrait évoluer, en particulier pour ce qui est des variétés de demi-saison et tardives, selon les conditions climatiques, mais aussi en fonction du comportement des marchés, notamment de l’Union européenne. La reprise économique qui s’y confirme est en effet à même de stimuler la demande.
D’un autre côté, le principal concurrent, l’Espagne, s’attend cette année à une production agrumicole de 6,5 millions de tonnes, en baisse de plus du quart par rapport à la dernière campagne. Mais la récolte de clémentine, bien qu’elle soit également en repli, est estimée à 2 millions de tonnes. « Avec sa proximité du marché de l’Europe occidentale et du débouché russe, la concurrence espagnole va gagner en acuité», prédit un gros exportateur.
Source : Médias24